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Une victoire des traditionalistes

Abbé G. de Tanoüarn

Nouvelle revue CERTITUDES - octobre-novembre-décembre 2002 - n°12

Il ne s'agit pas de se gargariser de ses succès. En l'occurrence, nous devons répéter avec saint Paul : Qu'as-tu que tu n'aies reçu ? Mais enfin rien n'interdit de prendre la mesure du chemin parcouru depuis trente ans par la résistance catholique au sein de l'Eglise. Lorsqu'en 1976, Mgr Lefebvre expliquait à ses propres partisans que la nouvelle liturgie était l'emblème d'une nouvelle religion, il portait un message tellement fort et tellement lourd que bien peu nombreux étaient ceux qui le suivaient, qui le comprenaient, qui l'accompagnaient vraiment dans sa démarche. Souvenons-nous l Pour beaucoup, suivre Mgr Lefebvre, cela signifiait marquer une nostalgie de bon ton pour le passé récent de l'Eglise, rien de plus. Combien de traditionalistes, alors, réagissaient uniquement d'instinct, sans chercher à comprendre plus loin que leur indignation ou leur allergie. L'ancien évêque de Dakar il faut le dire - loin d'être victime de son entourage, comme on a voulu le faire croire souvent - fut un prodigieux accoucheur d'âmes. En termes simples mais forts, il faisait naître la lucidité autour de lui. Ainsi, au cours du sermon qu'il prononça pour les ordinations sacerdotales de 1976, alors qu'il venait d'encourir une suspens a divinis pour sa désobéissance aux ordres du Vatican, déclarait-il tout uniment que la messe nouvelle était le symbole d'une nouvelle religion démocratique. C'est lui qui permit à beaucoup de catholiques de comprendre l'importance de l'attachement à la liturgie traditionnelle. C'est grâce à lui - disons-le cum grano salis - qu'aujourd'hui les catholiques Ecclesia Dei (dits ralliés) alors même qu'ils n'ont pas de plus cher désir que d'être obéissants au pape, continuent à refuser de dire la messe du pape : la leçon lefebvrienne a porté ! Cette question de la messe, au moment où Mgr Lefebvre l'a soulevée, apparaissait à beaucoup comme marginale. Elle est aujourd'hui au centre des débats, et c'est là - il faut le souligner - une première victoire des traditionalistes... La messe traditionnelle est en effet comme la manifestation concrète de l'ordre de la foi ! Lorsque le cardinal Castrillon déclare aujourd'hui que la liturgie traditionnelle jouit dans l'Eglise d'un droit de citoyenneté, il reconnaît implicitement l'importance vitale pour l'Eglise de sa Tradition. La route est longue, elle sera difficile, elle est exaltante.