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Don Quichotte et la démocratie

Abbé G. de Tanoüarn

Nouvelle revue CERTITUDES - janvier-février-mars 2003  - n°13

Il faut sans doute garder au cœur quelque chose de la simplicité bon enfant d'un Don Quichotte pour oser mettre en question ce nouveau dogme planétaire qu'est le dogme démocratique. Il faut admettre, comme lui, que quelque chose existe au-dessus du principe de réalité, quelque chose que l'on peut appeler la vérité ou que l'on peut nommer l'ordre, que l'on peut désigner comme l'honneur de cette curieuse espèce animale qu'est l'humanité.

La réalité politique aujourd'hui ? Elle est inconditionnellement démocratique. La démocratie d'ailleurs n'est pas seulement un régime politique, elle est une ère, elle est une culture, elle est l'une de ces idées dominantes, dont Auguste Comte disait qu'elles mènent le monde. Il faut de l'audace pour en contester la suprématie-Ce que nous voulons, dans ce numéro, c'est aller au-delà de cette masse écrasante du principe de réalité démocratique, pour tenter de poser l'hypothèse d'une vérité politique, supérieure à la volonté de l'homme et qui s'impose à elle. Si nous sommes ridicules, après tout, ce faisant, nous le serons avec Platon,

avec Aristote aussi, et avec tous ceux qui refusent de prostituer la beauté des vrais principes aux intérêts forcément plus ou moins sordides de l'instant qui passe. C'est ainsi que la vérité et l'honneur font toujours bon ménage : il faut un honneur donquichottesque pour reconnaître au-dessus de la réalité politique une vérité intangible, dont on ne se moque pas impunément. Il me semble que le moment est venu d'une telle mise en question, car au fur et à mesure que la démocratie (qui fut autrefois un luxe et un privilège) se diffuse et se vulgarise, elle tend à perdre tout contenu. Elle devient d'abord la réponse préfabriquée à toute mise en cause jouant ainsi comme justification primate de la Non-pensée officielle. Elle apparaît ensuite et surtout comme l'expression de ces désirs insatiables que l'homo democraticus tend toujours à prendre pour des droits. Est-ce un signe des temps ? Est-ce l'hirondelle qui ne fait pas le printemps, mais qui, malgré elle, l'annonce fatalement ? Fareed Zakaria, un jeune quadra indo-américain vient de publier une histoire de la liberté en forme d'examen de conscience... Il stigmatise vertement l'abus de démocratie, en particulier aux Etats-Unis. Différence entre lui et nous ? Là où lui ne voit que le bien-être maximal, nous croyons qu'il est nécessaire de parler du bien, et en particulier de ce bien qui est commun à une société donnée et que procure, bon an mal an, toute véritable politique.